COMITE DE FEVRIER

COMITE DE FEVRIER

Le comité de lecture du Centre Dramatique Des Villages du Haut Vaucluse
s’est réuni ce samedi 20 février.

Un texte a été retenu à l’unanimité des lecteurs/lectrices.

Il entre en lice pour le prochain Eclat de Coeurs.

Naître Ajar !

Texte de Vincent Gaillard

Né en 1970, a suivi depuis 2008 des formations en écriture de chansons et de spectacles musicaux. A une expérience d’auteur-compositeur de comédies musicales et de spectacles musicaux, compositeur de musique de documentaires.

Résumé

La pièce raconte l’origine et le déroulement de la mystification littéraire Gary/Ajar. L’auteur nous fait vivre à travers les personnages de Romain Gary, Jean Seberg et Paul Pawlovitch les sept années écoulées entre la publication du premier roman signé Emile Ajar et le suicide de Romain Gary, précédé de la mort de Jean Seberg.

Extraits des fiches de lecture

« Pari audacieux ! Théâtre documentaire ? Ecrire sur des personnes réelles, une histoire réelle même si elle est digne d’un polar ou d’une pièce de théâtre…. A-t-elle quelque chose d’universel ?

Toujours est-il qu’elle a le mérite de mettre Romain Gary et sa « drôle » de vie au théâtre. elle est bien écrite, resserrée sur le fil rouge Emile Ajar/ Romain Gary sans toutefois négliger la femme qui partagea sa vie : Jean Seberg.

Ces êtres aux destins lumineux mais si tragiques méritaient bien une place sur scène ensemble jusqu’au bout où le méchant fabriqué de toute pièce par leur besoin d’amour finira par les anéantir…»

« Quel art difficile, que ce soit en écriture théâtrale ou en écriture de roman, que de s’attaquer à des personnages qui ont existé et pour lesquels chaque lecteur a déjà la vie de ces héros en tête. J’ai commencé la lecture de cette pièce en cherchant sans cesse des repères dans les livres de Gary que j’avais lus et cela m’a empêché de déguster la pièce. Et puis, je me suis dit, que tout auteur a le droit de se saisir de personnages ayant existés et d’en faire les héros de son oeuvre : une fiction. Ensuite, je me suis attachée aux personnalités des personnages et là j’ai découvert en +++ la mythomanie, l’amour, la perversité, la passion, la manipulation, le mensonge, la culpabilité, la paranoïa, l’imposture, le refus de se soumettre, la douleur de vivre…»

« Une fiction théâtrale apporte souvent un éclairage autre, rend les personnages encore plus vivants. Ce texte, très bien écrit m’a happée et en même temps glacée, devant des vies si tumultueuses, exceptionnelles, riches mais si tragiques.»

« L’intérêt de cette pièce, qui est une fiction, réside dans l’essai de donner une explication de cette volonté de Romain Gary de ne plus écrire sous son nom et de, non pas prendre un pseudonyme, mais donner vie à un nouvel auteur et une nouvelle forme d’écriture.

L’intérêt de la pièce réside aussi dans la qualité de l’écriture de l’auteur, la construction qui suit une chronologie précise et dénote une recherche pointilleuse dont les résultats sont utilisés à bon escient sans alourdir le propos. »

Extrait du texte

Jean : Allons, je sais de quoi je parle : quand il a écrit « Chien blanc », il s’est servi de moi. Le livre est en définitive moins un plaidoyer pour l’égalité des races aux États-Unis qu’un instantané volé de la vie de Jean Seberg. Il m’a fait la même chose qu’à toi, il m’a dévoilée, brutalisée, il m’a pillée. Mais pour autant, sache que je n’ai jamais réussi à en faire mon pantin.

Paul : C’est qu’il ne t’a pas demandé d’incarner le personnage. Avec Ajar, Romain s’est piégé tout seul. Il a pris le risque de partager sa créature avec quelqu’un d’autre. Et à cause du pillage que tu évoquais, ce quelqu’un d’autre est en colère. Ah ça, le coup du fou a parfaitement fonctionné : je suis désormais le seul et authentique Émile Ajar tel que décrit dans « Pseudo ». Paranoïaque, dépressif, complètement taré, mais pleinement Ajar. C’est étrange le changement de regard que les autres portent sur moi. Désormais ils me respectent, pour un peu ils me craignent. Alors je fais taire Paul l’usurpateur et je leur donne du Ajar jusqu’à la nausée, je le leur propose virevoltant dans le Tout-Paris des lettres, je le leurrévèle apaisé, ayant tout pardonné à son vilain Tonton Macoute, je l’offre au Mercure de France où Simone Gallimard veut en faire son nouveau directeur littéraire. Je crois qu’il est en passe d’accepter. Qui sait ? C’est peut-être lui qui refusera le vrai-faux premier roman du prochain avatar de Gary, ce serait pittoresque, non ?