Prix Godot 2022 du Centre Dramatique Des Villages du Haut Vaucluse

Le prix Godot 2022 a été attribué à Pauline Peyrade pour son texte « A la Carabine », édité par Les Solitaires intempestifs. (voir https://cddv-vaucluse.com/pauline-peyrade-laureate-du-prix-godot-2022/ )

Le texte

« Ce texte répond à une commande passée par le Théâtre national de Strasbourg, La Colline et la Comédie de Reims : une forme d’environ une heure pour deux interprètes, à jouer dans les lycées partenaires de ces théâtres. Anne Théron l’a mis en scène. J’avais très peu de temps pour écrire et quand Anne m’a interrogée sur les interprètes, j’ai dit que je voulais écrire pour deux comédiennes sur le rapport des femmes à la violence. M’est alors revenue l’histoire de cette enfant de onze ans, violée par un jeune homme d’une vingtaine d’années qui avait été condamné pour détournement de mineur et non pas pour viol, car la victime avait été déclarée consentante. Comment s’en sortir quand la justice condamne la victime ? Comment se reconstruire alors que la place publique lui renvoie la responsabilité de sa blessure ? C’est une violence au moins comparable à celle d’une agression. »

https://www.journal-laterrasse.fr/focus/a-la-carabine-de-pauline-peyrade/

 

« Ce n’est pas une réparation. Ce n’est pas une résilience. Parce qu’il y a des points de non-retour, des intolérables. Parce qu’à la violence extrême ne répond pas l’espoir, ni la compassion, ni la compréhension. Parce que l’Histoire a canonisé Martin Luther King et diabolisé Malcolm X, alors que l’un n’aurait pas pu se faire entendre sans l’autre. Parce qu’on exhorte les soumis·e·s à la non-violence, au silence, à l’humour, à la patience, afin d’éviter que les forces ne se renversent. Parce que les femmes qui usent de la violence deviennent aussitôt des monstres. Parce qu’à la violence répond la violence, implacable, furieuse. »

https://www.franceculture.fr/oeuvre/a-la-carabine

L’autrice

Pauline Peyrade est écrivaine, metteure en scène et depuis 2019 co-responsable du département Ecrivain·e·s Dramaturges de l’ENSATT avec Samuel Gallet.

Parmi ses textes, 0615 a été mis en ondes sur France Culture et présenté au Soho Théâtre de Londres en 2015 ; Ctrl-X mis en scène par Cyril Teste en 2016 et finaliste du Prix des lycéens Bernard-Marie Koltès en 2017 ; Bois Impériaux créé par le Collectif Das Plateau en 2018.

En 2015, elle présente un Sujet à Vif au Festival d’Avignon avec la circassienne Justine Berthillot et fonde avec elle la #CiE. Elles créent le texte Poings en 2018 (Festival SPRING, Le Préau – CDN de Vire, Les Subsistances) et Carrosse en 2019 (La Comédie de Saint-Etienne, Les Scènes du Jura, La Comédie de Béthune, Festival SPRING 2020). Poings a été finaliste du Grand Prix de Littérature Dramatique Artcena 2018 et Lauréat du Prix des lycéens Bernard-Marie Koltès 2019. La même année, Portrait d’une sirène est présenté aux Rencontres d’été de La Chartreuse. Elle écrit également À la carabine, commande du TNS, d e La Colline et de la Comédie de Reims, mis en scène par Anne Théron et en tournée dans les lycées dans le cadre du projet Education et Proximité. En 2021, A la Carabine est lauréat du grand prix de littérature dramatique décerné par Artcena.

© Raoul Gilibert

ECLAT DE COEURS 2022

Le comité de lecture du Centre Dramatique Des Villages du Haut Vaucluse
a décerné le prix Éclat de Cœurs 2022
au texte de Céline Delbecq
A Cheval sur le Dos des Oiseaux
édité chez Lansman.

RÉSUMÉ

Carine Bielen, la cinquantaine, maman célibataire étiquetée « débile », est convoquée par un responsable de la Protection de l’Enfance ou par un juge des enfants à la suite d’un accident survenu à son domicile. Son bébé Logan, âgé de 8 mois et demi, a été retrouvé par l’assistante sociale qui suit la maman et l’enfant avec le bras fracturé alors qu’il dormait dans le lit de sa mère. L’enfant a été immédiatement placé en foyer d’accueil et la mère très attachée à son bébé mais consciente de ses difficultés doit s’expliquer sur cet accident et savoir si elle peut ou non continuer à s’occuper de lui ou s’il doit lui être retiré.

CE QUE PENSENT LES LECTRICES/LECTURES (EXTRAITS DES FICHES DE LECTURE)

 

« D’emblée, j’ai lu ce texte à voix haute. Les indications données par l’autrice m’y incitaient, ces codes indiquant le rythme et les silences plus ou moins prolongés. J’ai lu ce texte d’une traite, sans arrêt, sans envie de m’arrêter. Ma lecture m’a conduit dans un univers de sensations, d’émotions diverses. J’ai ri, j’ai parfois haleté, j’ai souvent eu une boule à l’estomac, j’ai eu l’impression d’être non pas face à Carine mais à ses côtés, partageant ses inquiétudes, ses peurs, ses rêves « à cheval sur le dos des oiseaux ». J’ai chanté Maman, les petits bateaux avec elle et certainement aussi faux qu’elle.

Il est paradoxalement parfois difficile de défendre un texte qu’on a aimé. J’ai aimé ce personnage si fragile et pourtant si fort dans son désir d’indépendance et son désir d’assumer seule sa maternité… »

« Je ne sais pas si je peux arriver à vous transmettre mon enthousiasme à la lecture de ce texte mais c’est pour moi un vrai coup de cœur à la fois poétique, émouvant, plein d’humour, d’humanité, d’amour et de réflexions : une petite merveille. »

C’est si bien écrit, que l’on est capable de respirer en même temps que le personnage. C’est une partition merveilleuse pour toute comédienne qui souhaiterait jouer un monologue. »

« J’ai adoré cette écriture car elle invoque la nuance, l’empathie, la réflexion, l’écoute, rien n’est jamais si simple qu’on le croit. Merci d’avoir donné voix et âme à ceux qu’on n’écoute pas, qui n’ont pas leur mot à dire, qu’on dénigre, qu’on ne croit pas, qu’on ne veut pas voir. »

COURTE BIOGRAPHIE DE L’AUTRICE

 

Issue du Conservatoire Royal de Mons, Céline Delbecq est comédienne, autrice et metteuse en scène. En mars 2009, elle fonde la Bête Noire asbl pour laquelle elle écrit et met en scène des pièces de théâtre s’inscrivant dans un contexte social occidental. Titulaire de nombreux prix, publiée aux Editions Lansman, traduite en anglais, espagnol, roumain, ukrainien, arménien, persan, Céline Delbecq a reçu des bourses qui lui ont permis des résidences d‘écriture et de création en Belgique, en France et au Canada. Elle a également eu l’opportunité de travailler au Burkina Faso, au Bénin, en Tunisie, à Haïti, au Mexique, en Iran… Elle est aujourd’hui artiste associée au Théâtre des Ilets/ CDN de Montluçon, à la Manufacture/CDN de Nancy et au Rideau de Bruxelles. Elle a mis en scène A cheval sur le dos des oiseaux qui sera le neuvième spectacle de sa compagnie (créé le 27 avril 2021 au Rideau de Bruxelles).

Comité de Lecture de décembre 2021

Le Comité de Lecture de décembre 2021 a retenu deux textes parmi les trois analysés.

Présentation de Ma Pov’ Lucette de Caroline Leurquin

Ma pov’ Lucette

Texte de Caroline Leurquin

Caroline Leurquin est autrice, professeure d’improvisation littéraire et théâtrale et animatrice Eloquentia. Parallèlement, elle joue : théâtre, improvisation, matchs littéraires et anime des ateliers de théâtre, d’écriture et des masters class en cinéma. Elle intervient sur les estrades des écoles par le biais de théâtre forum pour la protection des enfants et auprès des plus grands pour l’éloquence.

Son blog regroupe nombre de ses textes trépidants et caustiques : https://leschroniquesdecaroblog.wordpress.com/

Depuis Habitam eternam, (texte retenu à l’unanimité du comité de lecture) elle a écrit de nouvelles pièces notamment sur un chat abusé, une jeune adolescente, des cannibales, un scenario et un roman Tu verras c’est magnifique au titre prometteur…

Ma Pov’Lucette est édité aux Cahiers de l’Egaré/Le Pôle/La saison Gatti

Résumé

Marie, 15 ans élevée par ses grands parents, est accusée par sa grand mère de la mort de sa mère. Marie ne comprend pas mais accepte et se soumet et vit avec cette idée. Pour expier cette faute, sa grand-mère l’a mise en pension dans une institution religieuse très dure, soumise à la cruauté de Soeur Juliette. Là, elle se confesse régulièrement à un prêtre et souvent au cours de sa confession, elle voit le fantôme de sa mère. Jusqu’au jour où le prêtre lui confie que lui aussi voit le fantôme de sa mère. Et Marie apprend que ce prêtre n’est autre que son père. Entre temps, elle a rencontré un jeune homme Charlie dont elle est un peu amoureuse. Ils décident de partir ensemble pour vivre une vie loin des grands parents, du prêtre père….

Extraits des fiches de lecture

« Le titre « Ma pauvre Lucette », expression récente qui signifie « C’est comme ça, les règles sont ainsi et on ne peut pas les changer. », renforcé par la première réplique « pas regarder, pas lever la tête, pas croiser les yeux… » plante le décor. Le lecteur s’attend à ce que le personnage principal subisse l’action. Et c’est le cas pour Marie jusqu’à sa rencontre avec Charlie. Puis c’est l’apprentissage de la liberté et de l’amour jusqu’à perdre son identité et renoncer à son prénom. »

« Marie est un personnage très attachant dans sa fragilité, sa soumission, le regard qu’elle porte sur son entourage, sa rencontre avec Charlie ponctuée de méfiance et d’attirance. Charlie apporte de la fraîcheur dans une atmosphère lourde, avec ses poèmes naïfs et sa joie de vivre. Les autres personnages pourraient presque se ressentir comme des stéréotypes, mais n’est-ce pas une volonté de l’auteur/autrice pour éviter de tomber dans le drame ? En tout cas, c’est ainsi que je le ressens. »

 

« Lorsque j’ai lu le titre, vu la liste des personnages, j’ai eu peur d’un texte insipide, j’ai tourné la page peu enthousiaste. Et puis j’ai vu, lu la première réplique : « pas regarder, pas lever la tête, pas croiser les yeux…” Et là… Mon cœur s’est accroché à ces mots, à cette langue qui a pénétré en moi de façon instinctive, de façon émotionnelle. Cette réplique coupée d’une syntaxe correcte, d’une grammaire qui l’aurait allégée dit déjà que ce personnage dont on ne sait rien se raccroche à l’action, à l’essentiel, répète une leçon à laquelle il devra sa survie sans doute. Dès ces premiers mots, on sent un danger, on sent que Marie est dans une situation vis-à-vis d’autres personnages, dangereuse pour elle. Et la suite confirme, sortir, parler aux autres n’est pas bon pour elle. Les ordres fusent, tout est loi, impératif. Ça y est le texte, la langue m’accroche ! Je ne le lâcherai plus et les 50 pages ont défilé, le noir final est arrivé et je n’ai rien vu venir. Je serai bien resté à l’arrière de la moto avec Marie pour un périple plus long… »

« Les personnages sont plutôt intéressants mais je les trouve un brin « clichés », entre la grand-mère obsédée par les commérages et le nettoyage, le grand-père porté sur l’alcool et qui radote ses histoires de guerre, la sœur Juliette qui impose des sévices aux pensionnaires… Le personnage de Charlie, caissier de supérette à l’éloquence dragueuse est en revanche plutôt réjouissant dans son rôle de sauveur un peu poète qui va enlever Marie à cette vie étriquée. Si l’ensemble de la pièce se lit plutôt facilement et que l’histoire est plutôt intéressante j’ai eu du mal à en saisir les enjeux. Je ne sens pas particulièrement ce qui se joue entre les personnages. »

Extraits du texte

 

 

 

MARIE : pas regarder, pas lever la tête, pas croiser les yeux…

PAPI : comme ça t’y verras pas les pensées. Les pensées des gens tu sais…

MAMIE : tu prends une religieuse au chocolat, un millefeuille et un baba au rhum. Tu lui demandes de rajouter du rhum. Ils mettent jamais assez de rhum, c’est trop sec. Faut mettre du rhum dans le baba, au pire j’en rajouterai, si tout n’a pas été bu par quelqu’un… Tu demandes, t’es polie, tu dis s’il vous plait mais tu regardes pas dans les yeux. Surtout si c’est l’patron

PAPI : c’est pour ton bien. Nous c’qu’on veut c’est juste pour ton bien

MAMIE : pour la religieuse, si y’a plus au chocolat tu prends au café

PAPI : j’aime bien le café, ça m’dérange pas

MAMIE : et quand tu paies, tu vérifies la monnaie. Les gens ils ont l’air honnête comme ça puis dès que t’es en confiance, ils oublient de te rendre quelques centimes

PAPI : et des centimes plus des centimes ça peut faire une petite somme et puis à nous, ça en fait moins

MAMIE : tu regardes la monnaie, tu vérifies et tu regardes pas dans les yeux, tu vas pas nous r’faire une réputation.

PAPI : arrête avec ça !

MARIE : j’ai regardé personne, je regarde personne…

PAPI : c’est pas elle

MAMIE : si c’est elle !

PAPI : arrête avec ça, c’est pas elle, elle fait de réputation à personne

MARIE : je compte les pièces, je les regarde dans mes mains et c’est tout

PAPI : c’est la maladie il a dit l’docteur

MAMIE : nan, nan, une semaine après sa naissance ? C’est pas la maladie j’te dis, y connais rien le docteur

PAPI : y connait très bien, c’est pas la faute de la p’tite

MARIE : je regarderai pas… je compterai dans ma tête et je demanderai plus de rhum et je fixerai le gâteau si c’est le patron

PAPI : voilà, tu regardes pas. Tu prends les gâteaux et surtout t’écoutes pas ses méchancetés à elle

MAMIE : regarde-moi bien ma p’tite fille, tu nous as mis dans le deuil. Personne la remplacera ta mère, surtout pas toi. Alors va pas en plus nous salir la réputation avec tes regards.

MARIE : j’ai regardé personne mamie

Présentation de Rift de Virginie Vaillant

Rift

Texte de Virginie Vaillant

Extrait du Dossier de prod Collectif Le Poney/RIFT/ Texte Virginie Vaillant

PARCE QUE J’AI 40 ANS.

PARCE QUE J’AI DES CHOSES À DIRE.

PARCE QUE JE SUIS MALHEUREUSE, TRISTE, DÉROUTÉE, SURPUISSANTE, UNE FEMME

PARCE QUE JE SUIS COMÉDIENNE.

PARCE QUE J’AI PEUR DE DISPARAÎTRE.

PARCE QUE J’AI DISPARU.

PARCE QU’IL FAUT QUE JE LE DISE, LÀ, MAINTENANT, TOUT DE SUITE.

RIFT est un solo/duo.

Sur la disparition.

Celle de mon père, ancien mineur, qui part dans les limbes de la maladie d’Alzheimer.

Celle de Mon Amour qui a disparu. Qui veut disparaître. Qui résiste à disparaître. La mienne

dans les souvenirs de mon père et dans le trou laissé par l’être aimé.

J’y explore ma propre parole. D’une intimité jamais expérimentée, pour ma part, au plateau.

J’y mêle mes souvenirs, mes bribes, mes failles et donc ma fissure (« rift » en anglais) pour

faire surgir une forme de ce marasme que peut être la vie parfois.

Résumé

Une femme raconte sa vie à son père, semble-t-il, marquée par la maladie neurodégénérative de ce dernier et par les difficultés de son couple, au bord de la rupture. Son père ayant été mineur dans une ardoiserie, elle laisse aller les souvenirs de sa propre enfance, comme pour mieux le rejoindre dans ses souvenirs à lui. Au final, on assiste peut-être à la naissance de la perte de mémoire de cette femme, trop jeune encore.

 

Extraits des fiches de lecture

« J’ai lu ce texte d’une quarantaine de pages avec plaisir, intérêt et émotion. Et plus je m’enfonçais dans la lecture, plus je me sentais bouleversée ; mon expérience personnelleme ramenant à des évoquer des souvenirs douloureux d’une mère atteinte de ce type de maladie et d’un fils trop tôt disparu. Par contre, si l’ensemble m’est apparu rapidement comme ayant un lien avec la violence de la disparition, celle que l’on redoute pour soi et pour ceux que l’on aime, je n’ai pas bien compris si le père, l’Amour et les enfants étaient disparus ou plutôt, si toute cette réflexion était en lien seulement avec la maladie du père dont les souvenirs disparaissaient et si c’était pour s’interroger sur la solidité et la durée de l’amour en général, envers un conjoint, des enfants et des sœurs. »

 

« D’entrée, je lis un dialogue très rapide, phrases courtes, un peu absurdes car la réponse d’un des personnages est souvent « je ne sais pas ». Certaines questions ou réponses ne sont pas finies. Aucune didascalie de présentation ou d’explication de quoi que ce soit : texte nu donc. Ca ne me déplaît pas. Je ne sais pas où l’auteur veut m’emmener, je ne sais pas qui sont les personnages, mais je lis en me laissant porter, en faisant confiance à l’auteur. Et l’explication arrive au bout de quelques pages, puisque le dialogue se transforme en monologue explicatif de la maladie dégénérative du père, qui perd ses repères et lui apporte doucement la démence. »

Extraits du texte

 

Le souvenir d’une sensation peut-il disparaître ? Le souvenir d’une odeur ? De quelle odeur aimerais-je me souvenir le plus ? Quelle chanson ? Quelle musique ? Quelle lumière ? Si je ferme les yeux. Si j’avais fermé les yeux. Si je fermais les yeux. Verrais-je des toits bleus à perte de vue ? Une petite chambre claire qui sent la pisse ? Des enfants qui courent dans le sable ? Tes mains sur mes fesses ? Des collines de pierres d’ardoises pillées ? Des vallons verts et brumeux ?

 

Quelque part à Angers en 2017, dans une unité Alzheimer, un homme tente désespérément de voir quelque chose en fermant les yeux.

 

Quelque part à Angers en 2017, dans une unité Alzheimer, un homme disparaît tout doucement.

 

Quelque part en Normandie en 2017, je m’obstine à apparaître quelque part.

« Ce texte est une succession de courts extraits, un peu comme des articles de journaux, avec des polices et des tailles de caractères différentes…je pense à des papiers sur lesquels on note des bouts de texte, pour se rappeler d’un film ou d’une photo. Vers la dernière partie du texte, les passages sont de plus en plus tournés vers ses souvenirs d’enfant, comme le passage sur la notonecte, où elle répète les syllabes (par exemple « des bubulles »), comme si la fille était à nouveau petite fille… la maladie atteint-elle cette femme ? Je peux le penser car vient même un passage sans ponctuation, la mémoire disparaît peut-être ainsi ; on perd sa propre ponctuation… autre fissure ? Enfin, vient le passage où sont répétés de multiples fois de courtes phrases comme « c’est dur » « c’est cassé » (comme les roches d’un rift), je me dis que la maladie a gagné. »

 

« Je pense alors au titre de ce texte : « Rift », fait-il allusion à la déchirure de la Terre, comme à celle de la mémoire ou celle de la vie ? C’est un très beau titre, bien trouvé je trouve. La fin du texte est exactement le dialogue burlesque du début et cela éclaire ce démarrage opaque. C’est donc un « texte palindrome », comme pour rassembler et retenir les souvenirs entre ses deux extrémités. J’aime beaucoup cette idée. »

Comité de lecture du 29 octobre 2021

Comité de lecture du 29 octobre

Deux textes ont été retenus par deux lecteurs/lectrices sur trois et sont donc référencés sur notre site.

Mademoiselle Pan

Texte de Ariane Louis

Comédienne de formation, elle a joué dans divers projets aussi bien théâtraux que cinématographiques. Elle travaille actuellement en tant que comédienne et autrice sur sa deuxième pièce « Le Caveau est sourd. » ou « Petite » sélectionnée par le bureau des lecteurs de la Comédie Française (2019) et dont la mise en scène a été primée par un festival parisien (2019). De nouvelles dates sont prévues pour 2021. Côté cinéma elle a récemment joué dans le long-métrage indépendant « D’Etoile en étoile » d’Antonio Amaral pour lequel elle a reçu le prix « Best Actor » toutes catégories confondues du Liverpool Underground Film Festival (2020).

​Également autrice de théâtre, elle a écrit Mademoiselle Pan, Le Caveau est sourd, le Palais des Glaces, La Chanson des Malaimés, La Dame à la Lampe.

Résumé

Mademoiselle Pan refuse de grandir, ne veut pas se marier, ne veut pas avoir d’enfant. Sa mère Ogre devant ce refus la chasse de la maison. Pan rencontre Le Jeune Homme à la moto (en panne) qui en échange de l’eau de ses larmes accepte de l’aider. Et à partir de cet instant, tout s’enchaîne dans un rythme rapide où nous rencontrons un bateleur qui vend de l’oxygène (entre autres choses), où les jeunes gens croisent la mort et la guerre, deux sœurs jumelles, et le cortège de malheurs qu’elles traînent dans leur sillage.

Extraits des fiches de lecture

« J’ai pris un grand plaisir à lire cette pièce qui est faite pour la scène. Pendant toute ma lecture, j’ai vu les personnages évoluer sur scène tant l’écriture est scénique, non seulement au niveau de l’action mais également dans la représentation du jeu des acteurs, voire dans la représentation physique des personnages. C’est vrai dans l’ensemble mais particulièrement pour les personnages des deux sœurs (ex. la Mort aux doigts de rose dont je voyais les roses se flétrir ou reverdir en fonction de la situation), de Mademoiselle Pan qui perd son innocence, son enfance et sa liberté en même temps qu’elle se défigure, du bateleur l’Asticot que je ne pouvais qu’imaginer en succession d’anneaux tel un lombric.

La pièce est extrêmement rythmée, avec certaines scènes à jouer « d’un train d’enfer » comme celle de la demande d’emploi de Mademoiselle Pan qui m’a beaucoup fait rire et grincer des dents au final. Car c’est une caractéristique de cette pièce de théâtre : on rit, on s’amuse, on s’émeut mais on n’en ressort pas indemne. Il y a une vraie réflexion sur la liberté, la guerre et la mort, le monde qui nous entoure. Sous un vernis de comédie, c’est la tragédie du monde qui nous est contée. »

Yves

« Ce texte m’a tout d’abord rebutée à la lecture des noms des personnages qui me semblaient bien alambiqués, puis je me suis laissé happer par Mademoiselle Pan, dans ses désirs, sa conception de la vie, sa liberté. Je l’ai imaginée à travers les routes, se heurtant sans cesse à l’empêchement, à la violence.

Pour nous raconter tout cela, l’auteur a inscrit ce chemin de vie sur fond de guerre comme un conte dont l’héroïne aurait une quête et serait sans cesse empêchée. Très peu d’adjuvants pour elle, beaucoup d’opposants.

Je me suis laissé conduire avec un vrai désir de dénouement qui ne m’a pas déçue. »

Michèle

Au début de ma lecture je pensais que je lisais un texte jeune public avec une héroïne et le fameux parcours du héros, les personnages archétypaux (la mère ogre, la mort aux doigts de rose) m’y faisaient penser complètement et au fur et à mesure qu’on avance dans le récit on s’aperçoit que non, ceci n’est pas un texte jeune public. On sent que l’auteur a voulu traiter de la fin de l’enfance, son héroïne étant clairement une référence à Peter Pan, mais voilà, là, débute pour moi le problème, le fond est malaisant et il en ressort une sorte de morale nauséabonde qui me dérange drôlement, surtout à la fin quand l’héroïne est accomplie et devient enfin une femme car elle a été maltraitée et violée et que donc elle n’est plus une petite fille innocente. Cette fin me dérange énormément car l’héroïne n’a rien accompli au contraire des

Antigone, Iphigénie ou Phèdre de la tragédie grecque. »

Pierrick

Extrait du texte

MOUVEMENT I

Première vague La mère Ogre – Mademoiselle Pan.

Le matin. La chambre de Mademoiselle Pan.

La mère Ogre. Bien dormi ?

Mademoiselle Pan. Je dors encore.

La mère Ogre. Il n’est plus l’heure.

Mademoiselle Pan. Je suis fatiguée.

La mère Ogre. Il est temps de revenir à la réalité petit diamant mandarin !

Mademoiselle Pan. Laisse-moi fermer les yeux encore un peu…

La mère Ogre. Pendant que tu dors le temps continue de courir et après tu ne pourras pas le rattraper, tu seras trop en retard. Réveille-toi ! (Une lumière éblouissante envahit par vagues la chambre) Regarde-toi ma pauvre fille. Tes cheveux sont mal coiffés, ta chemise de nuit est toute froissée, tes yeux sont tout encrottés. Quel homme voudra bien de toi en te voyant comme ça ? Ce n’est plus la nuit ma mésange, le jour se lève. Fais-toi belle. Fais-toi grande. Sors d’ici et trouve-toi un homme.

Mademoiselle Pan. Je n’ai pas besoin d’un homme quand je suis dans mon lit.

La mère Ogre. Ne dis pas n’importe quoi. Un lit c’est fait pour faire l’amour pour me donner des petits-enfants, ce n’est pas fait pour autre chose. Lève-toi. Il est temps, il est l’heure. Chaque fois que le soleil commence son cycle tu es un peu plus vieille et pourtant tu refuses de grandir. Tu restes là, enterrée sous tes draps comme une enfant engloutie dans le ventre de sa mère. Tu n’es plus une enfant. Tu es une femme, que tu le veuilles ou non. Sors de là ! Il te faut quitter la maison. Voir ce qui se passe dehors. On n’échappe pas à la vie, Pan.

Mademoiselle Pan. Je suis bien comme ça dans ma solitude.

La mère Ogre. Tais-toi ! Je ne veux pas que tu rentres seule à la maison ce soir. Sors et trouve-toi un homme. Tu m’entends ? Trouve-toi un homme qui te prendra dans ses bras la nuit. Trouve-toi un homme qui collera son corps au tien. Qui dévorera ta bouche avec ses lèvres. Qui t’écrasera sous son poids. Qui couvrira tes cris de sa voix rauque.

Mademoiselle Pan. (Sa voix rêve encore) Un homme radiateur qui me tiendra chaud la nuit…

La mère Ogre. N’importe quel homme. Un homme radiateur, un homme billet, un homme stylo, je m’en moque, mais il faut que tu me donnes des petits enfants. J’ai faim. J’ai tellement faim. Tu es grande maintenant. Tu as l’âge d’avoir un mari. Tu as l’âge d’avoir un travail. Tu as l’âge d’avoir une ride au milieu du front pour avoir trop froncé les sourcils. Et tu n’as rien de tout ça ! Regarde-toi. Assise là, les yeux rivés sur un horizon que tu es seule à voir comme si tu y lisais quelque roman. Qu’espères-tu y trouver ? Lève-toi. Habille-toi. Cours dehors. Je ne supporte plus de te savoir dans la maison. La nuit souvent je me réveille et j’entends ta respiration, profonde et calme, et mon cœur tremble. Si j’essaye de fermer les yeux pour me rendormir, je vois ton visage impassible et tendre, et cela me donne envie de vomir. Je ne supporte plus de te savoir sous le même toit que moi. J’ai peur la nuit. J’ai peur de toi. J’ai peur que tu ne te réveilles pas. Jamais. J’ai peur que tu continues de dormir, même après que le soleil s’est levé et que je doive te garder à la maison pour l’éternité. Tu es belle, tu es si belle. En te voyant n’importe quel homme aura envie de te manger. Mets-toi un peu de rouge aux lèvres, coiffe tes cheveux. Tu es si belle que tous les hommes se retourneraient sur ton passage si tu voulais bien sortir d’ici !

Mademoiselle Pan. Il fait chaud sous ma couette, je n’ai pas envie de sortir. Je n’ai pas besoin d’un homme, je suis bien seule avec toi.

La mère Ogre. Tais-toi ! Quand tu dis ce genre de bêtises j’ai encore plus faim et ça me donne envie de te frapper. Il est temps. La vie suit son cours, elle court si vite. Tu ne peux pas rester là à attendre. Habille-toi ou je te frappe Pan ! Fais-toi belle. Sors. Trouve un homme ou l’on croira que tu ne manges pas de ce pain là et que tu n’es pas une vraie femme. La vie ne vacille pas sous la couette. La vie vacille dehors. La vie n’est pas que chaude. Elle peut être froide. Elle peut être dure comme de la pierre. Vivre ce n’est pas attendre et rêvasser pour tuer le temps. C’est le temps qui vous tue, jamais l’inverse. La vie n’attend pas. Dépêche-toi ou je te frappe ! Je ne veux plus te voir ici. Tu m’entends Pan ? Je ne veux plus te voir sous ce toit. Je ne peux plus le supporter. (La lumière tremble présageant un drame.) Je te dis mes maux Pan. Je te mots dits. Je te maudis et t’interdis de revenir à la maison sans un mari bien à toi. Sans un visage abîmé par le souci. Sans avoir peiné pour vivre. Je t’interdis de revenir à la maison tant que tu n’auras pas vécu. Tu ne retrouveras pas ton chemin. Les ronces pousseront pour te bloquer la route. Le soleil changera son cycle pour te perdre. Les loups se tairont et la maison restera tapie silencieuse sous la mousse des saisons. Tu ne connaîtras plus le repos Pan. Tu ne dormiras plus tant que tu ne seras pas devenue une femme. (Toute la maison tremble à présent) Sors maintenant. Sors avant que je ne te frappe. Sors avant que je ne te mange ! J’ai faim, j’ai si faim…. Cours Pan. Cours pour rattraper le temps perdu, cours jusqu’à en perdre le souffle, cours car ta vie en dépend.

Pan s’enfuit et court dans le monde extérieur.

Passif ?

Texte de Angel Liegent

Angel est metteur en scène et dramaturge. Après une formation au sein des classes de la comédie de Reims sous la direction d’Emmanuel Demarcy Mota, Francois Regnault, Arnaud Meunier etc… il poursuit son travail aux Pays-Bas.De 2006 à 2012, il écrit et met en scène une dizaine de spectacles et d’événements pour la compagnie « Mouettes » basée à Amsterdam. Il travaille également auprès des artistes néerlandais : Erwin Olaf, Herman van Veen ; Wies Merck et Rita Zipora.

 De retour en France, il collabore aux dramaturgies de pièces de théâtre, de films ou de films institutionnels, notamment avec le Fresnoy de Roubaix, ou auprès des réalisateurs des « Chevreaux Suprématistes » et le Musée de la Villette… Il crée quelques projets personnels comme le concert dramatique « Les Addictions » du groupe -Bi-, l’émission de radio sur la répétition de théâtre « Qu’est ce donc que le monde », ou le spectacle « Givre » sur un texte de Claire Massoubre, créé à Marseille avec le réalisateur Nicolas Gambini et impliquant de nouvelles technologies.

 Il rejoint l’équipe du collectif « Plastics Parasites » à l’occasion de la mise en scène et de l’adaptation des « Bonnes » de Jean Genet. Il poursuit actuellement sa collaboration en tant que dramaturge auprès de ce collectif

Résumé

Matthieu se sent fille mais il est né garçon, à la découverte de sa sexualité il multiplie les aventures et les rapports sexuels, il fait la rencontre de Paul « la seule personne qui dit-il « va l’aimer pour ce qu’il est réellement », mais sait-il lui-même qui il est vraiment ?

Et puis un jour il tue son amant avec un couteau.

Résumé

Matthieu se sent fille mais il est né garçon, à la découverte de sa sexualité il multiplie les aventures et les rapports sexuels, il fait la rencontre de Paul « la seule personne qui dit-il « va l’aimer pour ce qu’il est réellement », mais sait-il lui-même qui il est vraiment ?

Et puis un jour il tue son amant avec un couteau.

Extraits des fiches de lecture

« Etrange lecture découpée entre Mathieu et Narration. Entre présent et récit du passé de Mathieu jusqu’à ce, qu’à la fin, les deux espace temps se rejoignent.

J’ai lu ce texte plusieurs fois avant de prendre une décision… L’alternance Narration, Mathieu m’a, dans un premier temps, gênée pour la compréhension, pour me sentir pénétrée par les deux univers, les deux espaces de sentiments ou de sexe et de violence. J’ai donc relu en séparant : j’ai lu toute la partie Narration puis toute la partie Mathieu et j’ai mieux ressenti les différents univers, l’évolution de Mathieu. Je pense que c’est un texte qui a vraiment besoin du plateau pour exister pleinement. J’ai été très sensible à ces deux Mathieu : l’un dans l’univers du sado/maso et l’autre dans l’univers sentimental, perdu, amoureux, sensible, seul face au trouble qui l’habite ….

Bien sûr, certains trouveront peut être que des passages sont trop crus ; cela m’a aussi mise mal à l’aise mais c’est ainsi que des gens vivent, ressentent. L’auteur ne sombre pas dans la pornographie, il/elle ne fait que raconter, mettre en fiction des vies, une vie parmi tant d’autres et se serait se voiler la face de croire que personne ne vit ainsi. J’ai beaucoup pensé à Jean Genêt en lisant ce texte et à ses multiples incarcérations à cause de ses tendances sexuelles. Ecrire un texte de cette trempe aujourd’hui est une bonne chose, à l’heure où une pruderie dévoyée et stupide gagne du terrain.

Claudie

 

Première citation « je vois toujours à travers le ciel, la nuit noire de l’univers. Car il faut le savoir, notre ciel bleu est un leurre. » Robert Alexis

Ne connaissant pas cet auteur je fais des recherches et voici ce que je trouve : « Explorateur acharné de la complexité de l’identité, ses personnages sont soumis aux forces brutes du désir, seul moyen de libération du « Moi ».

Le corps est le champ de l’expérience, traversant perversions et transgressions, l’identité se révèle multiple. »

J’ai envie de dire que tout est dit dans ces quelques mots, j’ai lu ce texte comme un coup de couteau dans le cœur, l’histoire de Matthieu est poignante et la construction oscillant entre narration et jeu est particulièrement intéressante sur le plan de la mise en scène, à ajouter eu fait que l’action se situe dans deux espaces temps différent.

J’ai suivi le périple de ce jeune Matthieu de lieu en lieu dans ce long et douloureux chemin de son identité, se perdre pour mieux se trouver, se tromper, y laisser des plumes ou plutôt ici des bouts de soi, s’abimer le corps et subir, être « passif » celui qui est dessous, celui qui tient le rôle de la femme, laisser les autres nous dire qui l’on est.

Et puis un jour « s’affirmer », être soi et peut-être vivre, un peu…

Ce texte aborde des thématiques tellement importantes, m’a fait me questionner encore et encore sur cette question du genre et de l’identité, c’est aussi un sujet sensible et dont il est important de parler.

Matthieu et son double Narration, deux morceaux d’un même personnage morcelé,… sa parole est d’une écriture sans concession, brute et certains mots sont des coups de poignard dans le cœur, je ne m’étonne pas qu’il ait tué avec un couteau… »

Nicoletta

 

« Pour moi ce texte a été ardu à lire. C’est peut-être pour cela que beaucoup d’explications me sont nécessaires avant d’arriver à la rubrique “Ce que j’en pense”.

Si je devais résumer ce texte en un mot, ce serait CHAOS. Chaos dans la tête de Matthieu, Chaos dans le récit, Chaos dans la construction du récit.

Je me suis perdue plusieurs fois dans le texte et je regrette que l’auteur ait choisi de donner des explications et des codes de lecture à la toute dernière page. Cependant je ne suis pas sûre que ces explications et ces codes donnés en début de texte m’auraient permis de mieux cerner le personnage de Matthieu et les intentions de l’auteur.

Je ne suis pas arrivée à rentrer dans le texte en profondeur et très difficilement à l’imaginer sur un plateau. J’en suis désolée et un peu frustrée parce que j’ai l’impression que je n’ai pas eu accès aux intentions de l’auteur. »

Marie-Claude

Extrait du texte

 

Premier tableau : La boîte de nuit

Narration :

Avant de n’être rien, j’étais une fille… Ce qui me semblait déjà,

Vraiment pas grand chose.

 

Matthieu :

Prés du bar. Matthieu jovial et saoul

J’aime beaucoup tes chaussures ! Où est-ce que tu m’emmènes ?

Pourquoi ?

D’accord je viens avec toi…

Ils sortent

Narration :

Une fille certes, mais pas n’importe quelle fille, Une petite fille plus fille qu’une fille,

Une ultra fille,

La fille.

La seule petite fille parmi toutes les petites filles de mon entourage à savoir qu’elle était une fille, A savoir ce que voulait dire,

Etre fille.

Matthieu :

Tu avais besoin de prendre un peu l’air ?

Narration :

Plus gracieuse que Delphine…

 

Mathieu

 

Moi ça va…

 

Narration :

Plus studieuse que Rozen…

Matthieu :

Peut-être…

Narration :

Plus gentille que Marie…

Matthieu :

Je suis bien.

Narration :

Moins noire et moins sauvage que Reine…

Matthieu :

Tu as raison c’est agréable

Narration :

Et tellement plus jolie que Bérénice.

 

Matthieu respire profondément, sur-jouant un peu qu’il apprécie l’instant.


Comité de rentrée octobre 2021

Hypatie et la grande Bibliothèque d’Alexandrie

Auteur : Norbert Aboudarham

Ce texte a été retenu par deux lecteurs/lectrices sur trois

Résumé

 

« Hypatie d’Alexandrie a vécu au temps de la grande bibliothèque d’Alexandrie, dans l’Antiquité « tardive ». Brillante mathématicienne et philosophe, elle a été très influente auprès d’Oreste d’Alexandrie. Elle succombera au fanatisme des moines intégristes, qui la brûleront ainsi que la grande bibliothèque »

La pièce nous invite à suivre les dernières heures de sa vie.

Ce qu’en pensent nos lecteurs/lectrices (extraits des fiches de lecture)

La figure d’Hypatie e s t assez mystérieuse et charismatique pour en faire

une créature de théâtre qui puisse nous raconter le monde sans que l’on

se pose la question si cette femme a réellement existé ou non.

L’auteur.rice nous prend par la main pour rencontrer cette Hypatie et bien

que cette main soit un peu maladroite par moment, nous la rencontrons

bel et bien.

Je dis, un peu maladroite, car j’ai bien failli la lâcher au milieu du chemin.

Elle me montrait beaucoup trop de concept s philosophiques,

mathématiques, féministes, religieux, de manière un peu trop évidente et

didactique. Voir simpliste.

Je ne voyais que de vagues évocations de concepts sans le pourquoi les

évoquer.

Jusqu’au moment où j’ai remarqué les didascalies discrètes mais bien

présentes me faisant voir la possibilité théâtrale et donc la distance possible et nécessaire pour pallier à ces problématiques.

Hypatie rit tout le temps.

Ça peut sembler anodin mais c’est, je trouve, une porte d’entrée théâtrale très forte.

Plusieurs sen s peuvent arriver et donc une grande liberté de plateau.

Une possibilité de liberté et de puissance de jeu m’est apparue et Hypatie est devenue alors un personnage plus grand et a récupéré sa portée philosophique qu’elle me promettait au début.

Julien

 

Avec ce texte, j’ai découvert une figure emblématique de l’histoire. Avant cela, je n’avais jamais entendu parler d’Hypatie ni même croisé son chemin… Et pourtant quelle femme ! Pleine de sagesse, brillante, intelligente, simple, indépendante, libre…. Je suis très contente d’avoir pu la découvrir.

J’ai adoré les propos d’Hypatie, la répartie qu’elle a mais j’ai eu parfois la sensation de petites longueurs et l’impression de ressemblance dans les mots et entre les différents dialogues d’Hypatie et Oreste. Je ne suis pas non plus trop rentrée dans le délire un peu « fantastique ». J’ai aimé que l’on reste dans un lieu unique, celui de la bibliothèque et que l’ambiance de l’extérieur nous soit rapportée par d’autres personnes. Alors qu’on ne voit pas les moines, on sent leur violence et leur arrivée.

Sarah

 

Je salue le travail de recherche qui a dû être nécessaire pour écrire sur une figure historique largement oubliée de notre histoire et sur laquelle peu de sources et peu d’écrits existent et subsistent.

Mais est-ce que ce travail donne naissance à une pièce de théâtre ? Pour moi, ce n’est pas le cas. Je trouve l’ensemble des « scènes » bavardes et parfois donnant l’impression de tourner en rond. Le rapport d’Hypatie avec la connaissance et la transmission est central mais devient inintéressant à force d’être rappelé dans une scène sur deux sans évolution. Les personnages d’Oreste et de Synésios ne vont pas au-delà du stéréotype des amoureux transis et éconduits. Le moine Pierre est falot, manque d’ampleur et est incapable de donner une réplique sensée à une Hypatie qui s’amuse de son ignorance.

Yves

 

 

 

Extrait du texte

 

Hypatie : Que me vaut l’honneur de la visite du préfet d’Alexandrie ? As-tu découvert les secrets de cette étoffe qui semble vouloir voler un temps mais finit immanquablement par tomber au sol comme si quelqu’un ou quelque chose le lui demandait ! Les corps lourds tombent et les corps légers volent, cette étoffe est-elle lourde Oreste ?

 

Oreste : Madame, les étoffes vont cesser de tomber !

 

Hypatie : Voilà un phénomène que nous étudierons alors !

 

Oreste : L’agora s’agite… les chrétiens s’assemblent, ils injurient nos dieux, s’ils le pouvaient ces moines égorgeraient Aton,  Nephtys, Osiris et Isis. Les moines fanatiques veulent brûler la bibliothèque, ils disent que tout ce qui est contraire à Dieu est contraire au bien des hommes. Cyril, le patriarche fait la chasse aux sorcières. Il ne veut plus un païen, plus un juif dans Alexandrie. La ville est noire et sang !

 

Hypatie : Oreste, tu es le Préfet de cette ville. Le garant de son harmonie. Nous ne répondrons pas aux provocations de Cyril. Pourquoi ajouter notre sang à celui des Alexandrins ? Mon combat est ici. Je ne me battrai qu’avec la connaissance !

 

Oreste : Mais dans quelques heures vous ne pourrez plus vous battre. Demain ces papyrus s’envoleront en fumée.

 

Hypatie : Fermez les portes et venez travailler, nous étudierons aujourd’hui les coniques et les chrétiens n’y pourront rien…! Que les chrétiens viennent faire de la géométrie !

Courte biographie de l’auteur

 

Norbert ABOUDARHAM est comédien, auteur et formateur. Formé au clown, et au bouffon par Alain Gautré, il collabore à ses créations, comme comédien et compositeur. Il forme sa compagnie et joue la trilogie burlesque (Le Chat, Les Pigeons et le Panda, plus de 2000 fois en France et à l’Etranger).

 

Norbert enseigne « Le Burlesque » en France (AFDAS, CNAC, Ecole du Cirque de Nexon, CFPTS…), mais aussi en Espagne (Resad), au Portugal (Ecole Supérieure du théâtre et du cinéma), dans le Pacifique (Wallis et Futuna) et le Maroc (Agadir et Casablanca).

 

Norbert est l’auteur de deux ouvrages « Le Burlesque au théâtre » et l’Absurde au théâtre » aux éditions « Deuxième époques » et « L’Entretemps ».

Comité de rentrée octobre 2021

On the way home

Auteur : Pierre Berlioux

Ce texte a été retenu par deux lecteurs/lectrices sur trois

Résumé

En France, dans quelques décennies, dans un contexte de crise politique, une étrange maladie extrêmement contagieuse apparaît. Elle touche essentiellement les adolescents sous forme de tâches brunes sur la peau, elle évolue inexorablement vers la mort à l’âge de 17 ans. Ces jeunes contaminés sont soumis à un isolement strict dans des usines où ils doivent fournir un travail quotidien compensé seulement par le gîte et le couvert. Ce sont « Les Forçats ». Certains d’entre eux se sont échappés et essaient de survivre à l’extérieur. Ce sont « Les Sauvages ».

L’histoire raconte leur voyage clandestin au péril de leurs vies vers l’Angleterre qui possède le traitement permettant de guérir cette maladie.

 

Ce qu’en pensent nos lecteurs/lectrices (extraits des fiches de lecture)

Ce texte est très surprenant, son rapport au public est très particulier, car le public fait partie à 100 % du processus du spectacle, il se déplace, change de lieu, est à proximité des comédiens parfois même pris à parti et le public est doté d’accessoires lui faisant comprendre qu’il est un personnage de la pièce. En lecture ceci est passionnant car nous avons la chance d’avoir le point de vue des deux groupes ce que n’aura pas le public au début. Toute la force de ce texte est centré sur l’émotion, les personnages sont criant de vérité, ils sont très concrets, on se prend une vague d’émotion à chaque ligne, on ressent vraiment les choses en même temps que les personnages. Le point de vue de chacun est vraiment bouleversant on s’attache à chacun d’eux, on ne lâche pas le texte et à la fin j’étais vraiment triste de les quitter.

[…] ça fait du bien de voir un texte sur l’adolescence qui parle d’autre chose que des émois amoureux ou du harcèlement scolaire car oui les ados peuvent être touchés par autre chose que leurs nombrils comme on aime le penser, l’intensité perpétuelle de ce texte est parfaite pour eux.

Pierrick

 

Me voilà devant un texte relativement court (53 pages) mais qui regorge d’informations scéniques indispensables à la compréhension de l’histoire qui se joue devant et avec nous puisqu’il s’agit d’un spectacle immersif. Je dois avouer qu’à la 1ère lecture, je me suis sentie complètement engloutie par les multiples indications de l’auteur avant d’arriver à comprendre ce qu’il voulait faire, pas facilement visualisable pour moi au début mais prometteur au plateau avec un peu plus d’imagination. Les personnages aussi m’ont assaillie avec leurs différences, leurs appartenances, leurs implications, leurs relations plus ou moins esquissées et il m’a fallu un peu de patience pour arriver à apprivoiser un peu ce « ON THE WAY HOME ».

[…] Les personnages sont principalement des adolescents et malgré la gravité et le danger des situations il y a toujours de l’humour, de l’émotion, de l’étonnement. Les émois amoureux de ces garçons et de ces filles sont réels, même s’ils sont ambigus. On est attiré par celui ou celle qui nous ressemble et en même temps attiré par celui ou celle qui est différent. Et si « Les Forçats » sont un peu plus domestiqués que « Les Sauvages », il y a dans chacun et chacune du malheur, des blessures, de l’incompréhension, des chagrins, de la rage, de la colère mais aussi de l’espoir. J’ai aimé la façon dont je me suis progressivement rapprochée des personnages, même les plus radicaux qui ont quelque chose de touchant. On sent la faille pas loin du cœur. L’auteur ou l’autrice, sur un sujet aussi brûlant que l’immigration forcée (ici pour des raisons sanitaires) ne donne pas de leçon. Il ou elle raconte une histoire avec ses joies, avec ses peines, avec ceux qui en meurent et ceux qui vont peut-être pouvoir s’en sortir.

Marie-Claude

 

Si la construction de l’ensemble est très cohérente, à partir de la fin de la 3ème partie, j’ai l’impression que quelque chose se perd. En tout c’est ce que j’ai ressenti pendant la lecture. Comme si les thématiques abordées étaient moins bien traitées ou anecdotiques– notamment tout ce qui concerne les pratiques culinaires mais aussi les histoires d’amour et les jalousies qui se créent entre les différents protagonistes. Peut-être parce qu’on est trop dans des petites histoires individuelles traitées de façon, à mon sens, un peu simpliste, sous prétexte qu’il s’agit d’histoires d’adolescents.

Même si la pièce est plutôt bien construite, j’ai commencé à « décrocher » à partir de la moitié. Peut-être parce que les enjeux sont moins clairs, comme si l’auteur avait voulu décliner tous les possibles lés à la question des différences (l’origine, la langue, la nourriture, le genre, etc.)

Valérie

 

 

 

Extrait du texte

 

 

GARDIEN. S’il vous plaît, me touchez pas… Je suis pas responsable de ce qu’on vous fait faire.

SOFIA. Ah ouais, pas responsable ? Tu trouves pas ça chelou, toi ? Qu’ici, personne soit responsable, mais que tout le monde continue à bosser ? Tu vas pas me dire qu’on t’a forcé à faire le maton ? Hein ? Tu trouves ça normal comme boulot ?

Le gardien ne répond pas. Il les regarde, l’air inquiet.

ALI. Approche sa tête de la tête du gardien. Réponds ! Tu trouves ça normal ?

LE GARDIEN. Recule. Non !

SOFIA. Ali, attends ! Au gardien. T’inquiète, « mon grand ». On va pas te contaminer… On va juste te laisser moisir quelques heures, le temps de se casser loin d’ici. Mais t’inquiète, on va pas te faire mal, t’as toujours été flex avec nous…

LE GARDIEN. Merci… Vous… vous allez y arriver. Je crois en vous… Aujourd’hui, c’est le grand jour.

SOFIA. Écoute-moi bien. Tu diras à ceux qui te retrouveront qu’on est partis par les égouts.

ALI. Pigé ?

LE GARDIEN. Pigé. Faites-moi confiance, les jeunes.

SOFIA. Parfait.

Ali et Sofia se prennent dans les bras.

ALI. Sofia…

DIEGO. S’approche d’eux. Heu… on fait quoi, maintenant ?

SOFIA. On attend qu’elle revienne ! Se lève et va vers la porte. Qu’est-ce qu’elle fout ?

LÉO. Toujours en train de guetter. C’est sûr, elle se tape le couscous…

ALI. À Diego. Élise, elle est partie payer le passeur. Dès que c’est bon, on monte dans le camion pour Londres.

DIEGO. On y va en camion ? Par la mer ?

SOFIA. Pas possible… Montre Léo. Avec son humour, y ferait couler le bateau !

LÉO. Toujours en train de guetter. Relou… mais rigolo ! Sans moi, vous seriez déjà tous morts d’ennui.

ALI. À Diego. Par le Shuttle. Un tunnel. Tu verras. Pour l’instant, on attend Élise. Ensuite, tu nous suis, c’est tout.

LÉO. Elle est là ! Élise entre.

SOFIA. Alors ?

ÉLISE. Je le sens pas, ce gars. Faut se méfier, ça a l’air d’être – genre un gros crevard.

ALI. Ça m’étonne pas. On peut y aller direct ?

ÉLISE. Ouais. Il nous attend. Quand on sera dedans, faudra taper sur la vitre intér… Elle tousse.

SOFIA. Ça va aller ? Élise hoche la tête. OK, c’est parti !

LÉO. Attendez ! Faut bâillonner le gorille !

ÉLISE. Je m’en charge.

LE GARDIEN. Leur sourit. Allez les jeunes, soyez forts. L’Angleterre est à vous, c’est le destin !

ÉLISE. Le bâillonne. Le destin, on l’emmerde !

Courte biographie de l’auteur

Pierre Berlioux est né en 1990 en France.

Il étudie l’art dramatique au conservatoire d’Avignon ainsi qu’au TRAC de Beaumes-de-Venise et à l’AIDAS de Versailles. Il se forme auprès des pédagogues Vincent Siano, Carlo Boso et Ivo Mentes.

Il s’oriente par la suite vers la machinerie théâtrale et part en apprentissage au Théâtre de Célestins et à la Ferme du Buisson. Il travaille ensuite comme constructeur de décors et scénographe.

En 2013, il monte une compagnie de théâtre avec trois autres associé.e.s, la Comédie du Fol Espoir, basée à Grenoble. Il travaille pendant 5 ans à l’écriture des spectacles de cette compagnie où il est également comédien.

Parallèlement, il écrit des pièces dialoguées, des textes jeune public et des paroles de chansons.

Il habite désormais au Québec, où il a intégré le programme d’écriture dramatique de l’École Nationale de Théâtre du Canada.

Comité de rentrée octobre 2021

comite de rentree octobre 2021
Passage du Convoi cette nuit
Anne-christine tinel

Le Comité de Lecture du Centre Dramatique Des Villages a repris ses activités ce samedi 2 octobre 2021.

Le texte de Anne-Christine Tinel sera en lice pour le prochain Eclat de Coeurs.

Passage du Convoi cette Nuit

Autrice : Anne-Christine TINEL

Ce texte est en lice pour l’Eclat de Cœurs 2022

Résumé

Une enfant, Dina, part pour quatre jours en vacances seule avec sa mère handicapée mentale dans un hameau proche d’une usine fabriquant des avions. Elle y rencontre deux jeunes de son âge, Samuel et Solène, avec qui elle va se lier. Les trois enfants pensent avoir trouvé la manière de guérir la mère de Dina. Ils décident de mettre en application leur plan et sont stoppés in extremis par les parents de ses deux nouveaux amis. Finalement, ce n’est pas si mal d’avoir un peu de vide en soi !

« un peu de vide par-ci par-là, ça te laisse bouger les rêves, quand c’est trop plein on rêve pas »

 

Ce qu’en pensent nos lecteurs/lectrices (extraits des fiches de lecture)

Ce texte est composé de scènes très courtes, et certains titres sont bien trouvés car ils évoquent un peu l’aventure tels que « Echouer sur l’île après la tempête » ou « les autochtones »…car il s’agit bien là pour moi d’une aventure, celle de l’enfance, ce territoire inconnu et vaste mais surtout celui de tous les possibles.

Le jeu est un élément fort de ce texte, jouer à faire croire que notre vie est différente de ce qu’elle est en réalité, j’ai été très touchée par la tristesse douce-amère qui se dégage de ce texte, une sensation de nostalgie de ce temps d’enfance que l’on a connu et qui n’est plus aujourd’hui…un peu comme lorsque j’avais lu la trilogie de Pagnol surtout le dernier « Le temps des secrets ».

L’écriture de ce texte est très belle et poétique je cite un passage dit par Dina à son arrivée à Volvestre « Le car penche, on descend les marches, ça tremble, ça chatouille les mollets, les dents. Maman porte les valises. Elle a des bras forts. Dehors ça souffle comme un four chaud autour du rôti. Le car barrit, ça pétarade, on se tord les chevilles dans l’herbe brulée…La route, elle a des pansements clairs. »

Nicoletta

Un texte en rythme, en creux, qui laisse place au jeu du comédien /de la comédienne, à l’imaginaire des spectateurices. De la place dans le texte pour nous, lecteurices qui allons y prendre part. Cette place, ce creux, c’est du vide nécessaire, comme le vide dans la mère de Dina, comme le vide qui fait flotter les rêves dans le corps des enfants. Et ça marche, c’est étrange au début, comme la mère de Dina, mais ça marche et drôlement bien. L’embarquement est immédiat, d’abord dans le langage, celui de Dina. On voit tout, on comprend tout, dans ses phrases courtes, qui laissent nos déductions en suspens, le désir de voir où elle va, où elle nous emmène comme ça, déterminée, courageuse, pour trois nuits et quatre jours, seule avec sa maman. On s’attache vite et intensément aux personnages, à leurs relations. Le langage imagé semi-inventé-décalé de Solène est tout aussi créatif et enthousiasmant. Je suis retombée en enfance, et moi aussi j’ai voulu croire à leur plan improbable pour aider la mère de Dina.

L’écriture fait aussi beaucoup appel à nos sens, aux sensations, au ressenti. […]Ces mots passent par nos corps, les interpellent, les chatouillent du dedans. Et tout ce vocabulaire ultra-sensitif vient rebondir contre le corps mou et immobile de la mère-poupée de chiffon. Je trouve ce contraste très beau. Ce n’est pas une opposition, mais une mise en lumière de plusieurs réalités, une façon délicate et poétique de célébrer nos différences.

Elsa

Autant le dire de suite, j’adore cette pièce. Le thème abordé n’est pas facile à traiter, et par le biais de l’amour fille-mère et mère-fille qui transparaît en filigrane tout au long de la pièce aussi bien dans les répliques de Dina que dans ses actes, le propos en ressort grandi.

Il y a longtemps que je n’avais pas lu une pièce qui me plaise autant. Enfin dirais-je ! Elle est un concentré d’émotions, de poésies, de trouvailles, d’amour, de philosophie. C’est une pièce à

l’écriture simple mais efficace, d’une intelligence indéniable, pleine de finesse, de douceur et de délicatesse.

C’est une pièce riche de tant de choses : l’inventivité lexicale du langage de Solène et Samuel qui n’entrave en rien la bonne compréhension du propos, la façon dont les enfants traduisent le handicap dont souffre la mère, comment ils s’en emparent, comment ils sont capables de voir le monde différemment en s’en imprégnant… Vraiment, une pièce magnifique, très réussie.

Jean Luc

 

 

 

 

 

 

 

Extrait du texte

Epilogue

SOLENE – Chut !

DINA – Pourquoi chut ?

SOLENE – Ma mère ; plus le droit de jouer dehors…

SAMUEL – C’est l’été quand même !

SOLENE – On y était presque…

DINA – Dommage…

SAMUEL – La tête de mon père… Dans ses yeux je me suis vu : j’étais mort !

SOLENE – Ma mère, elle criait, t’es folle ou quoi ? Tu veux mourir ? Je me suis fait savonner la nuque mon vieux !

DINA – Mourir je veux pas, ça non, jamais !

SAMUEL – Moi non plus !

DINA – Heureusement qu’on n’a pas sauté.

SOLENE – Le vide, c’est du bon. Faut pas le dévider. Un peu de vide de ciel par-ci par là, ça te laisse bouger les rêves !

DINA – Quand c’est trop plein, on rêve pas ?

SOLENE – Il te reste seulement du dur d’idée très fixé.

SAMUEL – C’est pour ça, ta mère, qu’elle peut jouer !

DINA – C’est vrai, ma mère elle fait pas de crêpes mais dans son corps les rêves flottent, ils ont la place, et moi je rentre dans les rêves de maman et ensemble on rêve, on flotte…

SOLENE – Moi aussi, du vide, j’en ai.

SAMUEL – Fais voir ? Ils écoutent

DINA – Ah ouais…

SOLENE – C’est pour ça que je rêve.

SAMUEL – Et moi ?

SOLENE – Attend… ils écoutent Ah ouais, toi aussi…

DINA – Et moi ? Ils écoutent

SOLENE – Ben voilà, on en a tous du vide !

SAMUEL – On va chez toi ?

DINA – Il reste des biscuits et du jambon.

SOLENE – Paille-paille !

 

 

Courte biographie de l’autrice

Anne-Christine Tinel est autrice et dramaturge.

Passée par l’ENSATT, elle écrit des pièces de théâtre (Editions Koinè) et des romans. (Editions Elyzad).

En 2016, Demain, dès l’aube, je partirai a reçu le soutien du dispositif SACD-Beaumarchais « Ecrire pour la rue ». Deux autres pièces ont été couronnées par l’aide à la création du CNT-ARTCENA : Dans le formulaire en 2016, Fartlek en 2018. Fartlek, publiée aux éditions Koinê, (créée à la scène en 2020)

Ses pièces ont été sélectionnées par plusieurs comités de lecture pour leurs événements : lectures aux Lundi midi (Lyon, Paris), Comité de lecture du Val de Marne pour son Bouillons d’auteurs, Scènes appartagées pour Lire et Dire du théâtre en famille, sélection prix Esther, festival et concours  Les jeunes lisent du théâtre…

Elle travaille en collaboration avec des compagnies qui montent ses pièces, lui passent des commandes ; elle leur propose également un accompagnement dramaturgique pour leurs créations.

Deuxième rencontre du Comité des 100

Deuxième rencontre du comité des 100

le 12 septembre à Sérignan du Comtat

Le comité des 100 s’est réuni ce dimanche 12 septembre à la salle Achaume à Sérignan du Comtat pour une deuxième rencontre au cours de laquelle des extraits des trois textes en compétition ont été lus.

Lors de cette deuxième rencontre, Elsa Kmiec et Sarah Nedjoum, artistes associées du Centre Dramatique Des Villages, ont dirigé cinq lectrices du Comité de lecture dans la lecture d’extraits des trois textes en compétition. 

L’objectif de cette rencontre est de montrer qu’un texte de théâtre peut être lu mais qu’il est écrit aussi pour être dit, joué. Le passage à l’oralité a été apprécié des lectrices lecteurs du Comité des 100 présents dans la salle. Entre chaque lecture, des échanges ont eu lieu entre les différents participants, les lectrices et la metteuse en scène et autrice, Jeanne Béziers qui aura la charge de mettre en scène le texte retenu lors du Festival Des Nuits de l’Enclave 2022.

A l’issue de cette rencontre, bien malin celui qui peut dire quel sera le texte lauréat.

La prochaine rencontre du Comité des 100 aura lieu le 20 novembre à 17 h 00 à la Cigalière à Bollène. A l’ordre du jour de cette troisième rencontre, le choix définitif du texte lauréat. En attendant, chacune et chacun continue ses lectures.

Un grand merci aux lectrices Claire, Claudie, Marie-Claude, Michèle et Nicoletta, encadrées par Elsa et Sarah.

Comité des 100

comité des 100

Le Comité des 100 est constitué. 

Merci à tous les lecteurs et lectrices qui, enthousiastes, ont répondu présents très rapidement à l’appel du Comité de lecture du Centre Dramatique Des Villages du Haut Vaucluse.

Plus de 100 lectrices et lecteurs issus de milieux socio-professionnels variés, d’âges différents, habitant pour la majorité d’entre eux sur les trois intercommunalités du Haut Vaucluse, se réuniront le 13 juillet à l’espace Niel à Valréas à partir de 18 h 00 pour retirer les textes qu’ils devront lire cet été.

Les 3 textes ont été choisis par les membres du comité de lecture du Centre Dramatique parmi une présélection de 64 textes, non édités.

Rappel du projet  : les 100 lectrices/lecteurs devront choisir le texte qui sera mis en scène par Jeanne Béziers avec la troupe de comédiens amateurs du festival des Nuits de l’Enclave et créé lors du festival 2022. Les lecteurs se réuniront à trois reprises, ce 13 juillet  pour retirer leurs textes et rencontrer leur référent du comité de lecture. En septembre, les comédiens associés du Centre Dramatique Des Villages liront des extraits de ces trois textes devant le comité des 100 et des échanges sur les lectures pourront permettre à chacun(e) de défendre ou de peaufiner leur premier choix. En octobre, le choix définitif se fera lors d’une nouvelle rencontre. 

Pendant la saison 2021-2022, les membres du comité des 100 seront invités à assister à des répétitions du texte qu’ils auront choisi et naturellement, ils pourront assister à une représentation de la pièce au moment de sa création.

Rendez-vous le 13 juillet pour la première rencontre.

Le bivouac des comités de lecture

le bivouac des comité de lecture

Le comité de lecture du Centre Dramatique Des Villages du Haut Vaucluse
participe aux journées Les Voix du Bivouac à La Chartreuse de Villeneuve lez Avignon du 7 au 10 juillet 2021

Les Voix du Bivouac

Du 7 au 10 juillet, onze comités de lecture francophone bivouaquent à La Chartreuse de Villeneuve lez Avignon à l’invitation de Marianne Clévy. Il s’agit des comités de lecture de La Comédie de Caen, le Centre dramatique des Villages du Haut Vaucluse, le Théâtre de la Tête Noire à Saran, le Théâtre de Liège en Belgique, le Poche /Gve en Suisse, le Centre culturel de rencontre international de Ouidah au Bénin, le Prix Esther, Jeunes textes en liberté, l’Association à mots découverts, le Comité Collisions et le Troisième Bureau à Grenoble.

Le déroulé

Les onze comités de lecture ont proposé à La Chartreuse 21 textes d’autrices et d’auteurs francophones. Lors de ce premier bivouac, l’objectif est de découvrir les textes présentés par les différents comités, d’échanger, de discuter des parcours d’écriture.

Ensemble, les onze comités de lecture choisiront trois autrices/auteurs qui seront invités pour une résidence à La Chartreuse, aidés par la Bourse Bivouac, au premier semestre 2023.

En ouverture de soirée, l’équipe de La Chartreuse propose avec leur complicité une sélection de textes choisis parmi les lectures de la saison. Il s’agit de mettre en lumière le travail de « défricheurs » de ces comités qui s’engagent toute l’année, accompagnent l’émergence de nouvelles écritures de théâtre. C’est ce « terreau » vivifiant nécessaire à notre sens critique et à toute vie littéraire que La Chartreuse souhaite partager, autant auprès des professionnels que du public, convié non pas seulement comme spectateur passif mais comme un maillon actif de ce travail essentiel et exigeant de l’écoute d’oeuvres d’aujourd’hui.

 

Les lectures sont ouvertes au public sur réservation en cliquant sur le lien suivant

https://hub-char.shop.secutix.com/selection/event/date?productId=10228377842703

Lectures le mercredi 7 à 18 h, le jeudi 8 à 14 h 30 et à 18 h, le vendredi 9 à 18 h.

Pour découvrir certains de ces textes, L’équipe de La Chartreuse a choisi de réunir un groupe d’acteurs professionnels impliqué à ses côtés dans le travail sensible et particulier qui consiste à donner à entendre, en toute simplicité et humilité, comment ça joue, comment ça se lit, comment ça naît sous nos yeux.

 

■ 7 JUILLET – 18h :

– Le comptoir où le monde s’est échoué de Maïna Madec

– Taxiwoman d’Éric Delphin Kwégoué

– Tranzit de Gaëlle Bien-Aimé

 

■ 8 JUILLET – 14h30 :

– Les Endettés de Mathilde Soulheban

– La Traversée de Mireille Gandebagni

 

■ 8 JUILLET – 18h :

– Les Échos de la forêt de Mathilde Souchaud

– Délires à demi-mots de Nélio Joseph

– Regina Sancta de Mathilde Segonds

 

■ 9 JUILLET – 18h :

– Déesses, je me maquille pour ne pas pleurer d’Héloïse Desrivières

– Une Fille Qui Cloche de Valérie Schwarcz  

– Trop courtes des jambes de Katja Brunner traduit de l’allemand par Mathieu Bertholet

Lectures d’extraits de textes par les comédiens du groupe des acteurs-lecteurs 2021 de la Chartreuse : Armelle Abibou, Charly Breton, Valérie Diome, Corentin Hot, Roberto Jean, Alexia Krioucoff, Margot Madec, Julie Moulier, Julien Perrier et Aurélie Turlet